L'AUTRE MONDE

_ AAAAAAAAH　!!!

Alexandre s’était réveillé en sursaut en tombant de son lit mais, quand il heurta le sol, il ne ressentit aucune douleur. Etrangement, le plancher s'était affaissé sous lui pour amortir sa chute. Cependant, quand il se leva, celui-ci était bel et bien rigide.

Troublé, le garçon jeta un œil autour de lui, il percevait l'atmosphère inhabituelle qui s'était installé dans la pièce. Pourtant, tout paraissait normal. Alexandre se tenait debout dans une chambre aménagée sous les combles. La pièce spacieuse était ornée de meubles en bois. Le mur mansardé à presque un mètre du sol avait été peint en bleu. Ici et là, le jeune garçon avait accroché certaine de ces oeuvres: des planches de bandes dessinées, des croquis et des dessins plus enfantins. Son bureau était enseveli sous un amas de feuilles et de crayons en tout genre. Seul un coin était épargné par l'invasion pour laisser place à un vieil ordinateur. A proximité de son plan de travail, Alexandre avait rangé sur une large étagère, une pile de jeux vidéos, quelques romans d'aventures et de nombreuses bandes dessinées. Dans un coin, Alexandre aperçut deux avions miniatures sur sa commode. Enfin, sur sa table de chevet, son ...

"Des avions!?" réalisa Alexandre en reposant son regard sur les modèles réduits qu'il n'avait jamais vu. Il s'en approcha et étudia les deux engins qui lui rappelaient les chasseurs de l'armée.

Soudainement, Alexandre eut un léger mouvement de recul. Il lui semblait voir installé dans les cockpits, des êtres animés. Les soucils froncés, il fit un pas en avant. Interloqué, il pensa rêver. Il se frotta les yeux pour faire disparaître cette vision irréaliste. Mais quand il les rouvrit, les avions et leurs étranges pilotes étaient toujours là. C'est alors qu'il réalisa que l’un des aviateurs lui ressemblait, trait pour trait. Alexandre ne se rendit pas compte qu'il avait cessé de respirer, il restait immobile, les yeux écarquillés, la bouche grande ouverte.

Le domaine Romagnola se trouvait aux abords d'un petit village isolé. Son entrée était barrée par un impressionant portail en fer forgé au delà du quel le chemin se faisait plus étroit. Formé de terre battue, le sentier couvert de mauvaises herbes s'enfonçait dans une forêt de chênes. Le tunel végétal se prolongeait dans la pénombre jusqu'à une ouverture lumineuse qui donnait sur une vaste clairière. Au centre de cette étendue de verdure, un imposant manoir du XVIIème siècle s'élevait des hautes herbes.

Les parents du village interdisaient formellement, à leurs enfants, l’accès à cette immense domaine abandonné. Alors, immanquablement, ces petits chérubins s'imaginèrent toutes sortes d’histoires. «　C’est à la Belle-au-bois-dormant　!　» voulaient se convaincre les amateurs de comte de fée. « Elle est hantée par des fantômes　!　» racontaient les plus grands. « C’est le fantôme　d’une sorcière　!　» continuaient les autres.

En réalité, il n’en était rien de tout ça … ou peut-être un peu de tout, selon la manière d’interpréter les choses.

Quoi qu'il en soit, le jour où les sirènes de pompier brisèrent le silence qui reignait habituellement dans le village, le manoir était sur le point de révéler ses secrets. Car, ce jour-là, au bout du chemin, un jeu d’ombre inhabituel animait les arbres sur lesquelles se dessinaient d’inquiétantes formes rougeâtres. En effet, quelques minutes plus tôt, une détonation assourdissante avait retentit au cœur de la clairière.